Plus qu’une maison de poupée : les leçons de relations publiques du film Barbie

29 Août, 2023
Par Angel Carolino

J’ai une confession à vous faire. Quand j’étais jeune, je jouais avec des robots. Pas n’importe lesquels, le genre de robots avec des écrans de télévision à la place du ventre qui avait besoin de quatre nouvelles piles D chaque fin de semaine. Le genre de robots qui me bannissait de tous les goûters avec mes cousines, et que mes cousins trouvaient fun. Est-ce que j’avais des Barbies? Une seule et unique Barbie « bizarre » qui ressemblait beaucoup à Kate McKinnon dans le film.

Je n’ai rien contre Barbie, je n’étais juste pas particulièrement intéressée par le film. Mais après avoir été harcelée de vidéos promotionnelles et générées par les utilisateurs sur chacune de mes applications de médias sociaux ces derniers mois, je suis obligée d’accepter le fait que j’ai été influencée et que j’ai eu envie d’en savoir plus.

Le jour de l’avant-première et lancement du film est arrivé et la « Barbiemania » a surpris le monde entier. J’étais prête à laisser le temps à la folie rose de m’envahir un peu plus avant de regarder le film sur grand écran, sauf que ma fille de neuf ans (qui par coïncidence n’a jamais eu qu’une seule poupée Barbie) a demandé à le voir le plus vite possible, car elle et ses amies en parlaient depuis des semaines. J’ai donc acheté les chemises Barbie les moins chères que j’ai pu trouver et je suis allée au cinéma le weekend de la première.

Je ne m’attendais pas à grand-chose et m’étais préparée à voir une histoire bien ordinaire et faite pour les enfants. Mais je suis sortie du cinéma pleine d’inspiration, de curiosité et à la recherche d’un peu d’introspection. J’ai été complètement étonnée par la profondeur des thèmes qui ont été intégrés dans ce film fascinant. En tant que spécialiste des relations publiques, ce qui m’impressionne encore plus aujourd’hui, c’est le génie du marketing et des relations publiques qui a permis au film de devenir légendaire au cinéma.

Barbie est une génie du marketing

Le film Barbie a réussi à attirer l’attention du public non seulement grâce à son charme cinématographique, mais aussi grâce à une orchestration stratégique du marketing et des relations publiques. En effet, plus de 100 partenariats mondiaux avec des marques, des accords de licence et des intégrations ont été conclus pour capitaliser sur la « Barbiemania », et plus de 1,7 million d’articles, d’émissions et de mentions sociales ont été diffusés depuis le 1er juillet de cette année. La « Barbiemania » a aussi générée plus de 9 milliards de vidéos TikTok utilisant le hashtag #Barbie sur la plateforme, et une multitude d’autres promotions originales comme l’installation d’une boîte Barbie en 3D devant la Burj Khalifa et une véritable maison de rêve de Malibu que l’on peut louer via AirBnB.

Cette stratégie consistant à utiliser le fil d’Ariane derrière la campagne de marketing à long terme du film a fait des merveilles en taquinant le public, tout en suscitant un intérêt et des conversations spontanées. Ce qui me fascine le plus c’est que le buzz créé par cette stratégie n’a pas été instantané. Le film a réussi à conserver l’élan et a continué à gagner en popularité pendant des mois. Le succès ne s’est pas arrêté au jour du lancement, puisque les gens parlent encore clairement de « Barbiemania » près d’un mois plus tard.

Barbie est influenceuse multigénérationnelle

Le marketing et les relations publiques de Barbie ont établi de nouvelles normes en matière d’influence, capitalisant sur le pouvoir d’un large éventail d’influenceurs et de créateurs de contenu pour faire la promotion du film, mais aussi mettre en lumière les produits thématiques tels que le maquillage, les vêtements, ou encore les chaussures. Dans une génération où les plateformes numériques occupent toutes les fonctions, ils ont compris que la clé pour atteindre un public plus jeune se trouvait entre les mains de ceux qui retenaient déjà leur attention. Le résultat? Une vague impressionnante d’engagement organique, qui a permis de lier le récit de Barbie aux jeunes « natifs du numérique ».

Une autre tactique digne de mention est l’utilisation de l’intelligence artificielle pour générer des affiches, qui a non seulement inspiré des milliers de « mèmes » et fourni du contenu gratuit généré par des utilisateurs, mais qui a également réussi à attirer l’intérêt d’un autre groupe démographique clé. Selon le rapport trimestriel d’UTA IQ (anglais), 7 Américains sur 10 appartenant aux générations Z et milléniale ont exprimé leur intérêt pour le film Barbie, pointant les mèmes comme l’un des facteurs ayant suscité leur intérêt. Je pense que l’atout rose de Barbie réside dans un héritage dynamique emprunt d’une puissante touche de nostalgie, ce que peu de marques possèdent. En effet, le film a réussi à valoriser les connexions durables qui existent entre toutes les générations, nourries de souvenirs et expériences d’enfance, non seulement chez les aficionados de Barbie, mais aussi chez tous ceux qui ont été séduits par la magie de cette marque symbolique.

La recette des relations publiques de Barbie se distingue à la fois par ses résultats en matière de marketing d’influence, mais aussi par la finesse avec laquelle elle traverse habilement le paysage des différents groupes d’âge ciblés. En réalité, se rapprocher des différentes catégories démographiques n’est pas suffisant : il faut également parler le langage de chaque génération, faire résonner la nostalgie pour certains et saisir les tendances de l’ère numérique pour d’autres.

Barbie se met au défi et ose la contre-programmation

Dans le domaine des films, la plupart des réalisateurs hésitent à partager leur journée d’ouverture avec d’autres films très attendus. Pourtant, le film Barbie est sorti le même jour que le film de Christopher Nolan, Oppenheimer. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, les deux films ont réussi à surmonter cette situation, créant un effet unique intitulé « Barbenheimer ».

Ces deux films ont été un véritable triomphe dans le domaine de la contre-programmation cinématographique. Leur succès a dépassé les prévisions initiales du box-office, ainsi que les attentes du week-end d’ouverture. Aux États-Unis et au Canada, Barbie a atteint le chiffre impressionnant de 22,3 millions de dollars lors des avant-premières du jeudi soir, alors qu’Oppenheimer a obtenu 10,5 millions de dollars (un résultat significatif qui marque le premier cas où deux films sortant le même week-end ont obtenu chacun plus de 10 millions de dollars lors de leurs avant-premières).

Barbie a fait son entrée avec 162 millions de dollars et Oppenheimer avec 82,4 millions de dollars, consolidant le rôle du phénomène Barbenheimer dans l’augmentation de l’enthousiasme autour des films. Bien évidemment leur impact collectif a été ressenti, puisque 79 % des billets vendus au cours du weekend (52 % pour Barbie et 27 % pour Oppenheimer) ont été attribués à ces deux films, pour un total de 18,5 millions de spectateurs.

Pour conclure

Alors que le générique de fin se déroule et que les lumières s’éteignent, la magie du film Barbie continue d’opérer, évoquant le pouvoir transformationnel des relations publiques. Au-delà des chiffres, ce sont les stratégies et les tactiques novatrices de la campagne qui nous poussent à repenser les possibilités offertes par la confluence entre narration, impact culturel et changements. C’est un pôle d’attraction qui nous incite tous à revoir notre conception des relations publiques sous un nouvel éclairage.

Vous avez une question? Vous désirez en savoir plus?