Emily Ellis
Le mois dernier, les membres de notre équipe ont assisté au « Crisis Communication Bootcamp » de P World, en compagnie d’autres professionnels de la communication de multiples industries. Alors que la communication de crise est un domaine que nous connaissons bien, en tant qu’agence avec de nombreuses années d’expérience, nous tenons à rester informés sur cette compétence dynamique et essentielle. Un phénomène émergent de ce type de communication est la culture d’annulation (« cancel culture ») et nous sommes enthousiastes de partager quelques idées à ce sujet provenant de notre expérience du « Bootcamp ».
La culture d’annulation est définie comme « une pratique ou une tendance à s’engager dans l’annulation massive comme moyen d’exprimer son désaccord et d’exercer une pression sociale ».
Malgré une récente prise de conscience de ce phénomène, la culture d’annulation est ancrée dans nos sociétés depuis des décennies. L’accessibilité de l’Internet et l’essor des médias sociaux ont créé des forums de plus en plus nombreux pour les boycotts publics et les demandes de comptes. La culture de l’annulation a évolué pour changer notre façon de communiquer et de demander des comptes aux gens. Et dans de nombreux cas, ils ont EN EFFET besoin de rendre des comptes.
L’utilisation des médias sociaux comme « arme »
Le pouvoir et la popularité sans borne des médias sociaux ont révélé des perturbations et des hostilités autrefois non-inimaginables à l’égard des transgresseurs. Ceci a permis de mettre en lumière des injustices sociales de longue date et d’exiger des comptes de la part de ceux qui étaient auparavant à l’abri des conséquences de leurs actions ou de leurs commentaires (les personnalités publiques par exemple). En 2020, la culture d’annulation dominait les médias sociaux alors que la pandémie, et son lot d’inégalités sociétales et politiques, s’intensifiait. Le meurtre de George Floyd qui déclencha le mouvement #BlackLivesMatter, a permis d’exiger changement social et responsabilisation.
La capacité des médias sociaux à diffuser rapidement l’information et à stimuler les groupes et mouvements partageant les mêmes croyances, est doté d’intentions et de conséquences à la fois positives et perverses. Parmi les conséquences les plus lourdes, on peut noter :
- Le boycott d’une personne ou d’une marque
- La circulation et/ou la prise d’ampleur de campagnes de désinformation
- La radicalisation et le recrutement d’une organisation ou d’une cause particulière
Naviguer la culture d’annulation dans les organisations canadiennes
Chaque organisation est susceptible de se faire « annuler ». Qu’il s’agisse de scandales liés à la direction, de défaillances de produits, de vol de données, d’opérations contraires à l’éthique ou d’une campagne marketing qui tourne mal, les entreprises ne sont plus en mesure d’échapper à l’œil du public. Répondre à toutes les parties prenantes avant qu’il ne soit trop tard et de manière proactive est le facteur décisif pour se remettre d’une crise. Des organisations ont été boycottées dans les médias sociaux et par les médias traditionnels pour ne pas avoir répondu de manière pertinente à ce type de situation.
Les organisations doivent prendre en compte l’immense risque associé au fait de rester silencieuses pendant les premières phases d’une crise ou d’un boycott sociétal. Bien que certains chefs d’entreprise justifient le silence comme étant le meilleur moyen d’éviter les menaces et le rejet continus de la communauté, en fait, le silence envoie un message de désintérêt et ouvre la porte à la désinformation et aux perceptions erronées. Le public et les parties prenantes attendent des organisations qu’elles corrigent leurs actes répréhensibles de manière appropriée et s’engagent à apporter des changements durables. Les études démontrent qu’une communication de crise bien gérée affecte non seulement la perception, mais aussi les résultats financiers : 64 % des consommateurs achèteront ou boycotteront une marque uniquement en raison de sa position sur une question sociale ou politique.
Ne pas tomber dans le « woke-washing »
Pour obtenir l’adhésion du public ou rester attractif auprès de son audience, les entreprises peuvent être tentées de faire des gestes commerciaux tels que l’adoption de valeurs progressistes, le soutien aux mouvements politiques ou sociaux ou lancer des campagnes sans pour autant agir réellement. Mais le public ne se laisse pas aussi facilement berner. Selon une étude de 2019, 56 % des consommateurs pensent que trop d’entreprises adoptent ce genre de stratégie simplement pour augmenter leurs ventes.
Surnommé « woke-washing », les gestes commerciaux sans actions concrètes menacent la crédibilité et la confiance, entraînant des dommages à la réputation de l’entreprise, des critiques et des contrôles supplémentaires. Le « woke-washing » peut aussi inclure :
- Le « Pink-washing » : utiliser la cause LGBTQ2S+ comme stratégie marketing
- Le « Green-washing » : dépenser beaucoup d’argent en marketing pour la cause environnementale au lieu de minimiser l’impact des activités de l’entreprise sur la nature
Transition vers une « culture de la responsabilité »
Dès le début d’un boycott ou d’une situation de crise, il est nécessaire de présenter des excuses sincères et pertinentes. Pour appuyer ces excuses, montrez clairement que l’entreprise reconnaît son erreur, qu’elle est à l’écoute et qu’elle s’engage à continuer à apprendre.
Soyez honnête, ouvert et transparent. Les organisations échouent lorsqu’elles présentent des excuses sans agir. Comprenez pourquoi vous êtes désolé et comment éviter que la situation ne se reproduise – puis mettez en place un plan d’action et respectez-le.
Pour passer d’une culture d’annulation à une culture de responsabilité, les excuses doivent suivre un cadre qui implique :
- Séparer l’intention de l’impact
- Être à l’écoute, plutôt que d’être sur la défensive
- Réaliser qu’il ne s’agit pas de vous, mais que le rétablissement commence avec vous
- Reconnaître que le problème est une occasion de s’améliorer
Aller de l’avant
Dans le cours normal des affaires, des imprévus surviennent.
La culture d’annulation est simplement une autre menace à prendre en compte. Le meilleur moyen de protéger votre entreprise de conséquences catastrophiques passe par la préparation. Un plan de communication de crise complet et régulièrement actualisé fera toute la différence si votre entreprise se retrouve dans une situation délicate.
Au moment où l’incendie se déclare, il est préférable d’avoir un extincteur prêt à l’emploi, n’est-ce pas?